Jean-Pierre Dumas
Vendredi 19 juillet 2024
« Le Président a le devoir d’appeler le parti dominant à gouverner »
J-L Mélenchon
« Les partis finissent par s’attribuer tant d’importance qu’ils jugent la majorité des problèmes en fonction de leurs intérêts propres et ils poussent leurs conflits trop loin »
R. Aron
Les faits :
La droite a obtenu 65% des votes exprimés (au second tour), la gauche 26% (le reste divers droite et gauche). Le NFP n’est pas le premier parti de France en termes de voix exprimées. J-L. Mélenchon s’exprime comme s’il avait obtenu les deux tiers des voix. Cela s’appelle un coup de force.
Les partis extrêmes ont obtenu environ 60% des voix, ce qui est en cause ce n’est pas les règles du jeu (la Constitution), mais le triomphe du populisme, «On va changer le sort des Français par fiat, on fait table rase du passé, le verbe l’emporte sur le raisonnement».
37% des électeurs ont voté (au second tour) pour le RN, ils obtiennent 25% des députés à l’AN.
Grâce au scrutin majoritaire à deux tours et au barrage républicain, le parti NFP obtient la majorité des sièges (182), Ensemble (159), et le RN (142).
Les résultats auraient donné la majorité (relative) au RN si on avait appliqué la proportionnelle, 194 députés pour le RN (avec ses alliés LR), 173 députés pour le NFP et 123 députés pour Ensemble. Le système majoritaire à deux tours a donc favorisé le RN et Ensemble.
D’après la Constitution de la Vème, le Premier ministre n’est pas issu du parti qui a gagné les élections, mais est nommé par le Président de la République ; néanmoins, n’ayant plus de majorité, le chef de l’État ne peut choisir souverainement son PM, ce qui laisse libre cours aux combinaisons des partis.
La gauche « unie » commence à montrer ses divergences sur le choix d’un PM, ce n’est qu’un début.
Une coalition molle entre une gauche et un centre mou, harcelée d’une manière permanente et outrancière par une extrême gauche, risque de faire le lit du RN pour les prochaines élections présidentielles.
· Le RN avec 37% des voix au deuxième tour obtient 25% des sièges,
le NFP avec 26% des voix obtient 32% des sièges et Ensemble, avec 23% des voix, obtient 28% des sièges. Le système majoritaire à deux tours et le front républicain ont favorisé la gauche et la « majorité présidentielle ». Il est urgent de comprendre pourquoi tant d’électeurs (qui ne sont pas des fascistes) sont attirés par ce parti. Quel que soit le gouvernement qui va apparaître à l’issue de ce vote, il va mécontenter tout le monde (pas assez de social pour les extrémistes de gauche, si le programme économique du NFP est mis en œuvre (même partiellement), les marchés risquent d’attaquer une économie non viable, panique chez nos partenaires européens devant un gouvernement irresponsable qui ne respectera pas les règles budgétaires acceptées par l’État français, trop d’immigration pour la droite, trop de désordre généralisé), aux prochaines présidentielles, le RN pourra se présenter comme le seul parti crédible après l’échec des partis de gauche et du centre.
En dépit du front républicain, le RN obtient un pourcentage de voix plus élevé au second qu’au deuxième tour. Le NFP a perdu des voix au deuxième tour. C’est le NFP qui l’emporte en termes de députés. Le système majoritaire à deux tours a favorisé la gauche « unie » et la « majorité présidentielle ».
Tableau 1 Résultats élection législative de 2024, en pourcentage et en nombre de députés au scrutin majoritaire à deux tours
LFI a obtenu 74 députés c’est moins que Renaissance, moins que le RN, moins que LFI sous la précédente législature. LFI n’a aucune légitimité à imposer « son programme, que son programme tout son programme » ni à imposer son premier ministre.
· Le Rassemblement National réalise son meilleur score depuis sa création
En 2022, la RN comptait 89 sièges à l’Assemblée, aujourd’hui il a 142 sièges (une progression de 60%).
· Quels auraient été les résultats si on appliquait en France le système d’élection suivant le mode proportionnel ?
Si au lieu d’élire les députés au système majoritaire à deux tours en vigueur on avait appliqué le système proportionnel, quelle aurait été la composition de la chambre des députés? Le RN (avec les Républicains dissidents) aurait obtenu 194 sièges au lieu de 142 (ils perdent 52 sièges par rapport à la proportionnelle), le NFP aurait obtenu 173 sièges au lieu de 182, ils gagnent 9 sièges et Ensemble aurait 123 sièges au lieu de 159, il gagne 36 sièges. Le système majoritaire à deux tours et le front républicain ont nettement favorisé la « majorité présidentielle », le NFP et LR. Tant que ces partis seront au pouvoir, le système majoritaire à deux tours ne disparaîtra pas.
Tableau 2 Nombre de députés à la majorité à deux tours et à la proportionnelle
· Aucun parti n’atteint la majorité absolue
Aucun parti n’atteint la majorité absolue, 289 sièges (y compris avec le système proportionnel). Il manque plus de cent sièges à la première coalition (NFP) pour obtenir une majorité absolue ; ça ne l’empêche pas de décider qu’elle a gagné ces élections et de critiquer le parti « présidentiel » d’avoir gouverné sans légitimité, car il lui manquait 60 députés lors des élections législatives de 2022.
La « majorité présidentielle » fait un score important puis qu’elle arrive en deuxième position avec 159 députés, mais elle perd 70 députés par rapport à l’Assemblée de 2022, plutôt qu’à une « clarification », il faudrait parler d’« indétermination » (E. Phillipe). La majorité présidentielle a largement bénéficié au deuxième tour des désistements de la gauche.
Aucune formation n’obtient la majorité absolue, ne peut donc imposer ni son Premier ministre, ni son programme quoiqu’en dise le leader maximo d’un parti totalitaire. Dans un pays normal, ce n’est pas dramatique, on établit un gouvernement multi-partis qui établit un programme qui repose sur des compromis entre les différentes composantes du nouveau gouvernement. Pour qu’il y ait compromis, il faut avoir affaire à des partis de gouvernement et à des programmes plus ou moins viables; or le programme des Insoumis est inapplicable (celui du RN est flou et mouvant).
Les compromis sont impossibles dans notre pays dominé par deux partis qui proposent des programmes extrêmes (cf. photo) ; en outre, ils ne s’entendent sur rien sauf sur le fait d’empêcher toutes propositions qui viendraient d’une coalition centriste et d’un Président qu’ils abhorrent.
Comme le dit N. Gnesotto dans l’émission de P. Meyer, le nouvel esprit public (du 14 juillet 2024)
« Notre culture, c’est la grève sur le plan social (et pas la concertation avec le patronat), et l’opposition sur le plan politique (et pas la coalition ou le compromis). »
Il paraît que la IVe reposait sur un système parlementaire qui passait son temps à faire des combinaisons et que ça marchait. Peut-être, la Chambre des députés n’était pas dominée par l’équivalent du RN et de LFI.
· On ne change pas de Constitution, mais on change de paradigme
Le bon fonctionnement de la Vème repose sur une cohérence entre le président élu au suffrage universel et la majorité à l’AN, s’il y a concordance, le président a la main. À partir du moment où il n’y a plus concordance entre le président élu au suffrage universel et l’Assemblée, le président perd son pouvoir au profit de l’Assemblée. Il y a cohabitation, il y a déjà eu cohabitation sous la Vème, mais une cohabitation avec des partis de gouvernement, pas avec un parti révolutionnaire (peu importe que ce parti extrémiste ne soit pas important en nombre, ce qui compte c’est sa capacité à b. le pays,) et un parti d’extrême droite qui a fait de l’immigration son unique préoccupation. Ça risque d’être la IVe en pire.
· LFI, par ses positions politiques, économiques, et internationales, constitue un danger pour la démocratie et la France
Mélenchon et son parti par ses prises de position en faveur de Chavez et Maduro, deux leaders fascistes qui ont contribué à piller et ruiner leur pays, en faveur du wokisme, en faveur de Poutine, en faveur de la Palestine, en faveur de l’antisémitisme et enfin pour une économie centralisée constitue un danger mortel pour la France.
D’accord, très bien dit